Bikini et contagion numérique

[one-half-first]

Bikini et contagion numérique ou comment les réseaux sociaux se sont enflammés

#maillotdebain1
Un article de l’Union, notre quotidien local, indiquant qu’une jeune femme a été agressée dans un parc de Reims par d’autres jeunes filles parce qu’elle était en bikini a enflammé les réseaux…
Il est difficile de reprendre l’historique de la contagion numérique qui a provoqué cette poussée de fièvre. Ce qui est évident, et que nous avons tous pu constater, c’est qu’elle a secoué les réseaux tout le week end en impliquant des citoyens lambdas peu rompus à la prise de parole mais aussi, et c’est plus étonnant, des hommes et femmes publics (élus, journalistes, responsables associatifs..) qui se sont aussi engouffrés dans le débat sans grand discernement.
Ce tweet du maire de Reims Arnaud Robinet est une des exceptions locales qui a tenté de recadrer l’affaire et le “débat”.
 
#maillotdebain1
Tout commence par un article du journal l’UNION qui apparait notamment sur Facebook : « Une Rémoise de 21 ans profitait du soleil avec deux amies et bronzait en maillot de bain au parc Léo-Lagrange. C’est alors qu’un groupe de cinq jeunes filles passe à proximité. L’une d’entre elles est venue lui reprocher une tenue qu’elle jugeait sans doute indécente. Outrée, la jeune femme ainsi visée ne s’est pas laissée faire et une dispute s’en est suivie. Le groupe s’est alors jeté sur la malheureuse qui a été passée à tabac. » L’article précise que la jeune femme s’est vue délivrer une incapacité de travail de quatre jours, que le groupe comptait trois majeures de 18 à 24 ans et deux mineures de 16 et 17 ans « provenant de différents quartiers de Reims. »
Rien n’est dit, rien n’est explicite mais la machine à fantasmes va s’emballer sur fond de crise grave de la société française. On voit alors un torrent de posts à connotation plus ou moins racistes, la récupération des uns et des autres, le déferlement des propos outranciers, et même bien sur, comme toujours, l’humour tenté par certains…
[/one-half-first]
[one-half]
« islamophobie », « sharia », « burqa »… Pro et anti, athées et religieux, politiques et anti politiciens.. tous y vont de leurs posts. On ne peut même pas parler de dialogue ou débat, c’est comme toujours dans ce type de situation, des posts unilatéraux où la Punch Line doit être la plus forte pour être re-partagée par les partisans et dénoncée par les adversaires.
Une mobilisation organisée de manière rapide (trop peut être) à l’initiative de SOS Racisme, qui crée pour l’occasion le hashtag #jeportemonmaillotauParcLeo, est l’apogée de cette affaire qui restera surement comme un cas d’école pour les Community Managers. Très peu de monde se mobilise finalement de manière « physique » juste assez pour les cameras… Par contre sur les réseaux la polémique enfle et prend de plus en plus d’ampleur relayée par tous les médias nationaux.
« À l’heure dite, sous le ciel gris mouillé de Reims, on découvre les images plutôt comiques d’une poignée de personnes en maillot de bain – moins d’une dizaine – grelottant devant les caméras de télévision et les reporters venus plus nombreux que les manifestants. »
Source : Le monde online http://www.lemonde.fr/police-justice/article/2015/07/26/l-agression-d-une-jeune-femme-dans-un-parc-a-reims-enflamme-les-reseaux-sociaux_4699350_1653578.html#
sosracisme
Le soir on apprend finalement que c’est une simple « embrouille » sans connotation religieuse ou raciste et le soufflet retombe immédiatement laissant KO les participants qui ont contribué à enflammer et entretenir la fièvre numérique.
lefigaro
Alors certes nous sommes en plein été et l’actualité n’est pas très chargée, il ne fait pas très beau et on s’ennuie mais cette affaire est symptomatique :

  • de la volonté de faire su “sensationnel” sur les réseaux sociaux pour générer de l’engagement
  • de la vitesse avec laquelle une information peut être diffusée et déformée
  • de la force avec laquelle des communautés numériques peuvent se mobiliser et enflammer les réseaux
  • du cercle vicieux dans lequel est enfermée la presse qui soit absolument “communiquer” même quand elle ne possède pas d’infos (et contribue donc à brouiller les messages et à envenimer les situations)
  • du manque de sang froid de certains « responsable » qui se sont engouffrés dans cette affaire en y apportant eux-aussi une parole violente alors qu’elle aurait du être au contraire apaisante.

La communication sur les réseaux peut être d’une redoutable efficacité surtout quand elle rencontre les peurs et fantasmes d’une société sous tension. Communiquer sur les réseaux s’apprend et se maîtrise. A méditer…
[/one-half]

Arnaud Steffen

Arnaud Steffen

Arnaud Steffen, directeur, conseil en communication Arnaud Steffen est titulaire d’une licence en histoire-histoire de l’art et d’une maitrise en histoire contemporaine soutenue à l’Université de Reims Champagne Ardenne. En 1997 il rejoint l’agencepulsi.com fondée par Christiane Steffen. Il en devient le directeur en 2007. Son parcours universitaire lui permet…

Lire la suite