Je vous fait part de cet article lu sur le site des Echos. Celui-ci me semble tout à fait pertinent et contribue à un champ de réflexion dans lequel, à l’agence Pulsi communication, nous nous inscrivons.
“Il n’y aura pas demain, d’un côté, des entreprises « durables » qui ne se soucient pas de leur performance et, de l’autre, des entreprises performantes qui pourront s’abstraire d’être « durables ». Il y aura des entreprises performantes et durables à la fois, mais certaines plus que d’autres.”
Concilier business et intérêt général : un défi pour les entreprises
Quand on leur parle de responsabilité sociale, les chefs d’entreprise ont raison de répondre : « Tant que ces questions ne sont pas lisibles par mes actionnaires et interprétables en termes économiques et financiers, elles restent prospectives mais sans conséquence directe ». Tel est le défi que pose la séparation actuelle entre les données dites encore « extrafinancières -intensité énergétique, émission de carbone, situation sociale, écoconception des produits et des processus, avis des parties prenantes, etc. -et le cadre universel et réglementé de comptabilité qui mesure la bonne utilisation du capital mis à disposition par les actionnaires. L’économie de marché doit régler rapidement cette question, si elle veut répondre aux enjeux des prochaines décennies, pour concilier la performance du business avec la préservation de grands intérêts généraux. Il y a là un effet de levier bien identifié, complémentaire de la réforme de la supervision macroéconomique posée par le G20.
L’avenir de l’information RSE est dans le rapport financier pour que ces données précieuses soient soumises aux mêmes obligations de matérialité, de contrôle et d’approbation que les données qui contribuent à l’analyse de la valeur de la firme. C’est ce dispositif que la France vient de lancer de façon tout à fait pionnière dans la loi Grenelle II et qui va être observé de façon très attentive par les autres pays ; il faut espérer que l’Union européenne qui promeut l’exemplarité dans les pratiques d’entreprise, dans leurs implantations dans les pays à faible gouvernance et leur attention aux questions écologiques et aux droits humains, suivra bientôt ce chemin. Le Comité international pour l’intégration des rapports financiers et de développement durable, qui s’est constitué pour faire avancer cette question, s’appuie sur trois constats économiques.
Premier constat, les rapports de développement durable qui se multiplient aujourd’hui sont intéressants mais ils n’obéissent pas à des règles qui permettraient d’en faire un usage financier pertinent. Deuxième constat : le seul cadre qui mesure la performance reste le rapport financier. On sait, là aussi, que ce cadre comptable est aujourd’hui controversé et qu’il faut le faire évoluer, comme on a commencé à travailler sur le cadre des comptabilités publiques pour mieux saisir les réalités qualitatives de la croissance. Comme on l’a fait sur la question du carbone (Carbone Disclosure Project), ce cadre microéconomique doit s’élargir aux impacts sociaux, environnementaux et de bonne gouvernance des entreprises. La sincérité des comptes y gagnera et donc la bonne allocation des facteurs de production. Troisième constat : la convergence est en marche. L’adoption de la norme ISO 26000 a ouvert le chemin ; la Chine et les pays émergents sont doublement intéressés à élever les standards de la compétition économique, pour eux-mêmes et pour que la mondialisation ne se traduise pas par un dumping que viennent leur contester régulièrement les pays développés. Ce que l’OMC ne pourra pas faire, une norme d’intégration comptable améliorée pourra le faire. C’est le défi des prochains G 20 et tout particulièrement de celui sous la présidence française.
Il n’y aura pas demain, d’un côté, des entreprises « durables » qui ne se soucient pas de leur performance et, de l’autre, des entreprises performantes qui pourront s’abstraire d’être « durables ». Il y aura des entreprises performantes et durables à la fois, mais certaines plus que d’autres. Les investisseurs, les consommateurs et les salariés-citoyens exerceront de plus en plus leur préférence sur ces données également, si elles sont normées. Nous avons dix ans pour relever ce défi de l’intégration des données financières et extrafinancières dans le tableau de bord de pilotage de nos entreprises, sur lesquelles reposera l’essentiel du défi de prospérité posé au monde par l’arrivée de neuf milliards d’individus sur une planète limitée. Le travail conceptuel a été largement défriché et de nombreuses entreprises montrent la voie. Reste à gagner l’étape politique qui peut s’appuyer désormais sur un consensus croissant.
Source : les échos
Robert Eccles est professeur à la Harvard Business School et Patrick d’Humières est président de l’Institut RSE